Cet article est l‘introduction d’une étude réalisée par NUNDINOTOPIA sur une constellation de rapports publiés au sein de la filière en France entre 2005 et 2010, dont ceux des auteurs CHARIE, PLASAIT et MARGOT-DUCLOT. Il renvoie à la fin aux éléments plus complets du travail mené.
La filière française des Foires, Salons et Congrès réfléchit à elle-même avec inquiétude. Elle réfléchit intensément, de manière répétée et en même temps silencieusement, comme si elle n’existait pas, ou seulement avec fragilité : pas de continuité, des ilots, des fragmentations, des visées singulières, peu simplement de réflexion partagée. Il ne s’agit pas d’abord d’égoïsme des intérêts, ce serait trop facile, la passion et l’engagement ne manquent pas dans cette filière. La filière est encore en devenir et ne voit rien d’en haut, chaque colline semble à conquérir avant de lever les yeux sur le vaste paysage. Elle est elle-même un grand plan hétérogène et complexe.
Cette réflexion ne vient pas directement des opérateurs, les gestionnaires de sites, les prestataires, les organisateurs de manifestation. Peut-être furent-ils à la manœuvre dans l’ombre, mais toujours est-il que la formulation d’une synthèse de leur filière ne vient pas d’eux, mais des pouvoirs publics, même si ceux-ci ne se tiennent pas réellement hors de la filière, toujours mixte d’acteurs privés et d’acteurs publics. La filière elle-même ne semble pas avoir de contour précis. Son existence est même mise en doute quand ses opérateurs parfois les plus actifs ne s’y reconnaissent pas et préfèrent s’affilier aux marchés et filières sur lesquels leurs manifestations se tient. En effet les foires, salons et congrès ne vivent pas pour eux-mêmes, mais constituent des formes d’expression, des extensions, des presqu’îles de champs d’activité tiers, économiques, scientifiques et techniques ou politiques. L’organisateur d’un salon avouera souvent plus facilement son appartenance au monde qu’il rassemble qu’à la communauté des professionnels des foires, salons et congrès. Peut-être est-ce pour cette raison que la pensée de la filière ne tient pas sa source du cœur des acteurs, mais plutôt de ses jointures avec les pouvoirs publics ? Peut-être est-ce aussi la simple conséquence de la structure économique française, du rôle de l’Etat, d’une certaine propension à la recherche d’un grand centre ?
Cette réflexion avancera en tout cas des frontières tremblantes de la filière des Foires, Salons et Congrès, sur un chemin de crête, se tournant d’abord vers son corps morcelé, s’essayant à en constituer un semblant d’unité, puis vers le monde du dehors et ses enjeux. Ce regard réflexif de la filière n’apparaît ainsi apparemment que dans périmètre français, sans équivalent chez nos voisins européens et ailleurs.
Lorsque cette recherche de la filière se penchera de l’autre côté, elle ne se le dira pas complètement, comme à l’heure de l’éclipse où ne se voit que les contours du feu solaire. Elle se trouve là à l’invention de sa limite, vers les défis d’une réalité qui la dépasse. Mais ce qu’elle nous indique aussi c’est peut-être la nature même de cette filière d’être toujours jetée hors d’elle-même, en quelque sorte toujours plus grande et plus petite qu’elle-même. Et cette réflexion appartient à la filière, elle n’est pas une vue froide et insensible d’une tête toute dominatrice devant le spectacle des choses, elle est l’exploration et la construction de ses propres formes de vie.
Nous pouvons dater le départ de cette réflexion en France. Il s’agit de la publication en 2006 du rapport du député Charié à l’Assemblée Nationale « Foires, salons, congrès : pour que la France rime avec croissance »[1]. Pour la première fois en France s’écrivait une synthèse de l’ensemble de la filière française des Foires, Salons et Congrès. 2006, c’est une date récente et qui montre que nous sommes encore dans le tremblement de cette réflexion. Sans doute est-il abusif de fixer une naissance aussi précisément dans le calendrier, des linéaments existaient déjà puisque les débats font florès dans cette filière toujours pleine de projets. Mais l’énoncé constitué, solide, visible est ce rapport du député Charié. Nous devons, d’une manière ou d’une autre, rendre hommage à son esprit aventurier.
Le travail du Député Charié va s’inscrire dans une série de rapports, de 2005 jusqu’à 2010, une constellation particulière qui dessinera en quelques centaines de pages le schéma solide d’une pratique réflexive forte de la filière FSC en France. Nous ne sommes pas en 2017 sortis de l’influence de ce ciel. Pourtant, cette constellation reste un artifice et c’est nous, dans cet article, qui lui donnons un jour particulier, comme un moment de cristallisation majeure de la filière française. Elle ne semble rayonner que dans l’ombre et souvent sous le sable, sans plus d’attention par la communauté des professionnels et des acteurs d’aujourd’hui. Nous verrons même qu’elle a pu s’éteindre, sommeiller, et revenir. Les hésitations et l’intranquillité de la filière cachent encore des mystères.
Toujours est-il que nous profitons, grâce à cette constellation, d’un savoir constitué et cohérent de la filière FSC en France et de son mouvement pour se penser elle-même et construire son action. Cela est précieux et il importe de tenter la répétition de ce travail pour continuer à en récolter les fruits et à alimenter les feux nombreux qui furent allumés. Cet article est composé de trois parties. La première décrit la constellation des rapports, jusqu’à son écho dans le récent contrat de la filière « Rencontres d’affaires et événementiel » signé par l’Etat et la Profession des FSC fin 2016. La deuxième partie extrait de la lecture de ces rapports une première carte des catégories communes à toute la constellation pour penser la filière FSC, autour d’un grand triptyque TERRITOIRE-GOUVERNANCE-FILIERE. La filière FSC est inconcevable sans les deux grands pans d’une mécanique territoriale et de la formation d’une gouvernance. Toutefois, cette carte reste trop pliée sur elle-même et ne rend pas toute l’énergie concentrée dans cette constellation – ce sera donc l’objet de la troisième partie- qui laisse entrevoir et parfois avec suffisamment d’insistance des leviers stratégiques autour des enjeux du monde, du sens de l’événement et de la création de valeur à partir des marchés, et du jeu possible des territoires, de leur rééquilibrage en France à l’ambition d’une échelle européenne. La constellation tient ainsi en réserve la possibilité de penser autrement, d’échapper à un schéma centralisateur : des échappées sont possibles.
(Extrait du Livre blanc, partie 4 Captation. Captation 2 : Filière / CONSTELLATION)
Partie de l'étude d'où est extrait l'article : les explorations de la constellation
Ensemble des articles de l'étude "Constellation"
Les six rapports de la constellation :
CHARIE Jean-Paul, Foires, salons, congrès : pour que la France rime avec croissance, Rapport d’information de la commission des affaires économiques, Assemblée nationale, février 2006
MARGOT-DUCLOT Jean-Luc, Rapport de mission sur le Tourisme d'Affaires, remis au Président de la Région d'Ile-de-France J.P. Huchon, 2005
PLASAIT Bernard, Le tourisme d’affaires : un atout majeur pour l’économie, Rapport pour le Conseil économique et social, juin 2007.
COMITE NATIONAL DE PILOTAGE DES FOIRES, SALONS ET CONGRES, Rapport d'étape, 4 décembre 2007, par FSCEF (ex-UNIMEV), CCIP, FRANCE CONGRES
PREMIERES ASSISES NATIONALES DE L'INDUSTRIE DES RENCONTRES ET EVENEMENTS PROFESSIONNELS, 28 janvier 2008 à Paris-Nord Villepinte, Une filière mobilisée pour hisser la France au premier rang mondial, par FSCEF (ex-UNIMEV), CCIP, FRANCE CONGRES
MARGOT-DUCLOT Jean-Luc. Contribution de l'Agence Régionale de Développement à la SRDEI de la Région Ile de France, la filière des Rencontres et Evénements Professionnels en Ile-de-France, 2010